Le 15 du mois de Shvat (Tou bi Shvat ט"ו בשבט) est le nouvel an des arbres fruitiers [39].
Fleur d'amandier |
Cette date correspond à la fin de la saison pluvieuse en Israël.
Les arbres ont leur Nouvel An[39], car la Torah prescrit de compter leurs années pour n'en consommer les fruits qu'après la quatrième[15].
Cette loi ne s'applique qu'aux fruits produits en Israël.
L'âge des arbres se compte à partir du moment où ils s'implantent en terre (la graine pousse, la greffe s'accroche, etc.)[61]. L'arbre doit d'abord passer trois Rosh Hashana, puis ce n'est qu'au Tou bi Shvat suivant que ses fruits pourront être consacrés aux Cohanim (prêtres). Enfin, encore un an plus tard, lors du Tou bi Shvat suivant, le peuple peut en consommer les fruits à son tour.
Cette fête ne s'accompagne pas d'obligation particulière. Ce n'est pas un jour chômé. L'usage de Tou bi Shvat est de consommer des repas de fruits, en commençant par les sept par lesquels la Terre d'Israël est évoquée dans la Torah[38]. Il est préférable de les goûter en respectant l'ordre suivant instauré par les Sages[73]:
- le blé (on mange une pâtisserie à la farine de blé, ou du pain)
- l'orge (une pâtisserie ou une boisson à l'orge)
- l'olive
- la datte
- le raisin
- la figue
- la grenade
Pour approfondir |
Q> Pourquoi une différence entre le nouvel an des légumes et celui des fruits ? Pourquoi le 15 Shvat ? |
La Torah établit le principe de distinguer les années des récoltes, car il est interdit de mélanger
dans une même offrande des produits issus de la dernière récolte avec des produits anciens[63]. Or la pluie est un élément naturel fondamental à toute récolte de légumes, de céréales ou de fruits. Sous cet angle, Rachi clarifie la définition du fruit de l'arbre [64]: tandis que la pousse des légumes absorbe directement l'eau de chaque pluie, jusqu'au moment de la cueillette, l'arbre fruitier constitue d'abord une réserve de résine avec les eaux de pluie, jusqu'à la floraison, puis les fruits sortent et mûrissent en puisant leurs ressources dans cette sève, non plus dans les eaux de pluie même s'il en vient encore. C'est pour cette raison que les Sages du Talmud ont fixé la date de transition des années de récoltes des fruits de l'arbre au 15 Shvat : en Israël, l'essentiel des précipitations de la saison d'hiver est tombé[65], et Rachi précise que c'est alors que les fruits sortent et que la réserve de résine est constituée. |
Q> Quel symbole pour l'homme cette fête des fruits représente-t-elle ? |
La Torah compare l'homme à un arbre[95].
Les fruits de l'homme sont ses mérites, et l'éducation qu'il prodigue à ses enfants
ou ses élèves. La fête de Tou bi Shvat met l'accent sur le mécanisme par lequel les fruits de l'arbre sont produits : en profitant au maximum des bienfaits de la pluie, l'arbre constitue une réserve de sève, la meilleure possible, qui alimente ensuite directement le fruit. Une fois la sève constituée, l'arbre n'a plus aucune influence sur le fruit, seule la sève qu'il a produite en transformant l'eau de pluie, donne au fruit sa ressource et son énergie, sa qualité et son goût. Il en va de même pour l'homme et l'éducation qu'il donne à ses enfants. La pluie, eau bienfaitrice qui tombe du ciel, est souvent comparée à la Torah. Il appartient à l'homme de puiser dans la Torah tout ce qu'il peut donner de bon à ses jeunes enfants, de leur fournir la meilleure éducation possible dans le respect de l'Autre, du Créateur et des mitsvot ; car, une fois la réserve d'éducation - la sève - constituée, une fois l'enfant grandi et autonome, le parent n'a plus la possibilité de bonnifier sa trajectoire ou ses qualités humaines. A l'inverse, ne pas appuyer les valeurs familiales et l'éducation des enfants sur les fondements solides de la Torah, revient, pour un arbre, à ne pas recevoir la pluie indispensable à assurer l'avenir et la qualité des fruits. |
Q> Si Tou bi-Shvat est relatif aux précipitations, pourquoi la date est la même pour les années régulières et les années embolismiques ? |
Il est vrai que le rôle de l'année embolismique est précisément de récupérer le retard pris par l'année lunaire
sur l'année solaire et ses saisons. Lors d'une année embolismique, la nature n'est pas encore prête pour le printemps,
lorsque se termine le mois intercalaire Vé-Adar. Il est donc légitime de supposer que la saison des pluies n'a pas encore
franchi le seuil de la moitié des précipitations, au 15 Shvat. Pourtant les Sages ont décidé malgré tout de ne pas décaler la date du Nouvel An des arbres pour les années embolismiques. On peut y voir un message fort de courage et d'espérance que la tradition veut nous transmettre. L'explication assertive de Rabbi Oshia n'est pas anodine : ce Sage était érudit sur le décalage de l'année lunaire par rapport aux saisons. Or s'il a décidé de ne pas nuancer son commentaire sur la majeure partie des pluies tombées jusqu'au 15 Shvat, date fixe par rapport à la lune et donc glissante par rapport à la saison hivernale, on peut supposer qu'il faisait allusion à la force de la prière d'Israël. En effet, contrairement à la fête de Pessahh, que la Torah associe obligatoirement au printemps et pour laquelle il est donc nécessaire de courber le calendrier, la pluie est un bienfait que D.ieu accorde au peuple juif et à la Terre d'Israël en fonction de ses mérites. C'est par la prière qu'on invoque la pluie, et les mérites sont jugés à Rosh haShana. Aussi, par le maintien à date fixe du Nouvel An des arbres, le Talmud nous enseigne que la nature n'a pas autant de force que la prière, et n'a aucun pouvoir sur l'accomplissement des mitsvot et les mérites des Bnei Israël. C'est pour que le peuple juif accomplisse la Torah que D.ieu a créé le monde matériel et la nature soumise à Ses lois, mais les mitsvot et la prière les transcendent. En affirmant que les pluies sont passées, une fois franchie la date du 15 Shvat, Rabbi Oshia affirme que D.ieu jugera favorablement les mérites des Juifs, dont la prière ne perdra jamais de sa force et de sa détermination. |